Qu'est-ce qui donne naissance aux caractéristiques uniques de chaque individu ? C'est un peu à cette vaste question que tente de répondre Benjamin Lehner, sur le plan de la génétique. Ses recherches associent exploration génétique et recherche sur le cancer. Elles combinent expériences à grande échelle et méthodes bioinformatiques.

Au-delà du code génétique

Nous portons tous en nous des gènes hérités de nos parents, qui définissent certaines de nos caractéristiques. Pourtant, ce « code » est loin d'expliquer toutes nos particularités. D'ailleurs, comment se fait-il que des individus au génome identique et vivant dans les mêmes conditions puissent développer des caractéristiques différentes ? Pourquoi certaines personnes portent une mutation délétère dans leurs gènes sans jamais développer la maladie associée ? Comment prévoir les différences de caractéristiques manifestes – ou phénotype – entre individus à partir du séquençage de leurs génomes ?

Ce sont là certaines des nombreuses et fascinantes questions auxquelles Benjamin Lehner s'intéresse. Y répondre pourrait faire progresser les recherches concernant les traitements de certaines maladies, telles que le cancer.

Benjamin Lehner - Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant 2016
  • Ben Lehner, chercheur au Centre de régulation génomique de Barcelone et lauréat du Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant, dans son laboratoire.
    ©DR
  • Laboratoire de Ben Lehner, chercheur au Centre de régulation génomique de Barcelone et lauréat du Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant.
    ©DR
  • Ben Lehner, chercheur au Centre de régulation génomique de Barcelone et lauréat du Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant, dans son laboratoire.
    ©DR

La puissance de la bioinformatique

Benjamin Lehner a déjà enquêté sur des questions très fondamentales sur la complexité des interactions génétiques chez la levure et le simple ver Caenorhabditis elegans. Il utilise la puissance des bases de données génétiques pour tirer des conclusions sur la biologie humaine.

Il a par exemple réalisé des travaux pionniers sur des interactions génétiques naturellement présentes chez tous les organismes. Les mutations combinées de deux gènes font en effet apparaître des phénotypes surprenants, allant jusqu'à la mort. La paire de gènes partenaires n'est pas nécessairement exprimée chez tous les individus. Il est ainsi difficile de prédire le phénotype à partir de la simple séquence.

Le soutien de la fondation

Le prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant va permettre au scientifique britannique d’enquêter sur l'origine de ces variations chez Caenorhabditis elegans. La petite taille et la croissance rapide de ce ver permettent d'y tester un très grand nombre de conditions.

Transférés vers l'homme, les résultats de ces recherches permettront de cibler spécifiquement les partenaires d'interactions des nombreuses mutations des cellules cancéreuses. Des thérapies taillées sur mesure pourront ainsi être développées. Les médecines prédictives et personnalisées dans leur ensemble bénéficieront de cette compréhension nouvelle des interactions entre génome, environnement, histoire personnelle, parentale et hasard.

Benjamin Lehner en quelques mots

Benjamin Lehner se familiarise durant son doctorat à l'Université de Cambridge avec les méthodes d'analyse computationnelle qui soutiennent encore aujourd'hui tous ses travaux. Il tombe amoureux de Caenorhabditis elegans, petit ver nématode, lors de son post-doctorat auprès d'Andy Fraser. L'organisme modèle lui procure un système élégant pour l'exploration de la complexité génétique.

L'équipe qu'il dirige depuis 2006 à Barcelone a retravaillé avec des méthodes computationnelles originales les données génomiques publiées par d'autres chercheurs. Elle a découvert des motifs de mutation/sélection auparavant ignorés. Elle a aussi développé des librairies génétiques pour Caenorhabditis elegans et explore des processus aléatoires de mutation dans les cellules cancéreuses. Elle travaille à décrypter les différentes conséquences de mêmes mutations, dans des individus identiques génétiquement ou non.

Portrait de Ben Lehner, chercheur au Centre de régulation génomique de Barcelone et lauréat du Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant, dans son laboratoire. ©DR
  • 2004 Doctorat de biochimie et biologie Moléculaire, University of Cambridge (Royaume-Uni)

  • 2004 Post-doctorat dans le laboratoire du Dr. Andrew Fraser, Wellcome Trust Sanger Institute, Hinxton (Grande-Bretagne)

  • 2006 Chef d'équipe Systèmes génétiques, Centre de regulacio genomica, Barcelone (Espagne)

  • 2009 Professeur de la Catalan Institution for Research and Advanced Studies (ICREA)

  • 2013 Professeur de Biologie Intégrative, Imperial College London (Royaume-Uni)

  • 2013 Professeur sur la Chaire AXA de la Prévision des risques dans les maladies liées à l'âge

Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant

Le Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant récompense chaque année un chercheur de moins de 45 ans pour l’excellence de ses travaux et sa contribution remarquable à son domaine de recherche scientifique. Ce prix est attribué selon les années à un chercheur établi en France ou travaillant dans un autre pays d'Europe. Vingt-sept lauréats ont été récompensés depuis 1997. A partir de 2023, la dotation de ce prix récompense personnellement le lauréat à hauteur de 100 000 euros.

Tous les lauréats du prix