Savez-vous ce qui rend le comportement de chaque individu unique ? À l’université d’Oxford, les recherches de Scott Waddell éclairent le fonctionnement de la mémoire, jusqu’à l’échelle du neurone. Certains de ses travaux les plus récents pourraient même expliquer l’individualité des cerveaux.

À la recherche des souvenirs

« L'un des plus grands défis de la neurobiologie est d'essayer de localiser les souvenirs, de voir une représentation physique dans le cerveau de la formation d'un souvenir », affirme Scott Waddell. En effet, même si les progrès dans le domaine de la neurobiologie sont nombreux, de multiples mystères restent à élucider sur le fonctionnement de notre cerveau.

Au-delà de la curiosité et de la soif de découverte, ce domaine de recherche est crucial dans le domaine de la médecine. La compréhension des mécanismes du cerveau peut en effet avoir un impact sur le traitement de nombreuses maladies liées à un dysfonctionnement de cette partie du corps si particulière.

Scott Waddell - Lauréat Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant 2014

Étudier les « gènes sauteurs »

Scott Waddell sait implanter de faux souvenirs à des mouches. En manipulant directement des petits groupes de neurones, il peut tout aussi bien leur donner faim. Le chercheur intervient sur ces comportements pour décrypter le fonctionnement de la mémoire. Son approche a permis une découverte inattendue, qui pourrait expliquer par exemple les différences de personnalités entre jumeaux homozygotes.

Au sein des corps pédonculés – structures dédiées à la mémoire propres aux insectes – Scott Waddell a découvert que chaque membre du groupe de neurones α/β possède un capital génétique distinct. À l’origine de cette individualité, les éléments génétiques mobiles : de petites séquences d’ADN capables de se transposer d’une cellule à l’autre. Ces « gènes sauteurs » s’intègrent au hasard dans les génomes des neurones des corps pédonculés. Ils seraient la source des nuances de réponses des mouches aux stimuli de l’environnement.

Le soutien de la fondation

La Fondation Bettencourt Schueller, en récompensant Scott Waddell pour ses découvertes, soutient la poursuite d’un programme de recherche qui prévoit de caractériser les événements de transposition à l’échelle du neurone unique. L’importance de ces travaux dépasse la recherche fondamentale. Chez l’homme, la schizophrénie, l’addiction ou encore la démence liée à l’âge ont été corrélées avec des taux anormaux de transposition dans des zones du cerveau apparentées à celles étudiées par Scott Waddell chez la mouche.

Ce soutien financier a permis au scientifique d'étoffer son équipe de recherche. En accueillant de nouveaux talents au sein de son projet, il a pu pousser encore plus loin ses expérimentations fascinantes.

Scott Waddell en quelques mots

Les premiers travaux de recherche de Scott Waddell, lors de son doctorat, concernent la cancérologie. C’est pourtant en lisant les articles pionniers de Chip Quinn, relatifs à l’influence de gènes uniques sur l’apprentissage et la mémoire, que le jeune chercheur trouve sa voie. Le post-doctorat qu’il réalise sous sa supervision l’amène à faire ses premières découvertes sur le processus de stabilisation de la mémoire chez une mouche.

Les techniques d'avant-garde qui ont permis cette découverte aident ensuite Scott Waddell à mieux définir le fonctionnement des corps pédonculés, siège de la mémoire chez la mouche. Les travaux qu’il mène avec son équipe à l’université d’Oxford apportent un nouvel éclairage sur la manière dont nous comprenons l’apprentissage. Ils pourraient dévoiler l’origine cellulaire de l’intelligence chez tous les animaux.

  • 1996 Doctorat en biologie moléculaire, University of London (Royaume-Uni)

  • 1996 Post-doctorat, Massachusetts Institute of Technology, Cambridge (États-Unis)

  • 2001 Professeur et chef d’équipe, Département de neurobiologie, University of Massachussetts Medical School, Worcester (États-Unis)

  • 2010 Wellcome Trust Senior Research Fellowship in Basic Biomedical Sciences

  • 2011 Professeur de neurobiologie et chef d’équipe, University of Oxford (Royaume-Uni)

  • 2014 Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant

Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant

Le Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant récompense chaque année un chercheur de moins de 45 ans pour l’excellence de ses travaux et sa contribution remarquable à son domaine de recherche scientifique. Ce prix est attribué selon les années à un chercheur établi en France ou travaillant dans un autre pays d'Europe. Vingt-sept lauréats ont été récompensés depuis 1997. A partir de 2023, la dotation de ce prix récompense personnellement le lauréat à hauteur de 100 000 euros.

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