Créée il y a plus de 20 ans par une équipe de médecins et de soignants, l’association Agir pour la Santé des Femmes multiplie les actions pour offrir aux plus précaires une prise en charge globale de leur santé, tenant compte de leurs besoins spécifiques. Un projet rare qui porte une attention essentielle à la santé de genre, largement soutenu par la Fondation Bettencourt Schueller.

Gare de Lyon, un soir de septembre dernier. Les derniers voyageurs attendent leur départ, assis dans le grand hall. À leurs côtés, quelques femmes encombrées de grands sacs ne prendront, elles, jamais de train. Venues ici trouver un refuge pour la nuit, elles font partie des femmes de la grande exclusion, de plus en plus nombreuses en France. Selon les derniers chiffres de l’association Abbé Pierre (2020), notre pays compterait 300 000 personnes sans domicile fixe, 2 sur 5 étant des femmes. Vivant dans la peur de l’agression, la plupart cherche à se rendre invisible et passe ainsi sous les radars, comme en témoignent les différents dispositifs de soins, pensés essentiellement pour les hommes ou les familles avec enfants. Or ces femmes présentent le plus souvent un état de santé très dégradé ; par l’errance, les violences dont elles sont victimes, le manque d’hygiène, de prévention et de soins spécifiques à la santé féminine.

C’est pour répondre à leurs besoins que le Dr Bernard Guillon a choisi, voilà plus de 20 ans, de créer l’association Agir pour la Santé des Femmes, accompagné d’une équipe de médecins et de personnels soignant, tous issus de l’action humanitaire et décidés à faire reculer ce désintérêt pour la santé de genre.

ADSF - Agir pour la santé des femmes

Prendre en charge la santé physique, mentale et la situation sociale des femmes en situation de grande précarité : telle est la mission de l'ADSF – Agir pour la Santé des Femmes depuis 2001. Cette association a été créée par le...

« Notre démarche est essentielle mais elle reste cependant assez unique, confirme Myriem Maicha, directrice générale de l’association. Dans notre société, on s’intéresse encore peu à la santé des femmes en s’attachant à leurs besoins physiologiques. »

Originale dans sa mission, l’association l’est également par sa structure. Elle réunit une quinzaine de salariés et une cinquantaine de bénévoles, parmi lesquelles des « Femmes Repaires », qui se sont trouvées elles-mêmes en situation d’exclusion et ont réussi à sortir de ce contexte difficile, le plus souvent grâce à l’aide de l’ADSF.

Un camion médical qui sillonne les rues, à Lille et Paris 

L’association se fixe pour objectif d’améliorer la prise en charge des femmes les plus démunies en adoptant la démarche « d’aller vers… ». Pour cela, elle dispose de camions médicaux où prennent place des équipes (médecin, psy, travailleur social, Femme Repaire) qui, jour et nuit, effectuent des maraudes.

  • Membres de l'association ADSF en mission.
    © ADSF
  • Membres de l'association ADSF en mission.
    © ADSF
  • Membres de l'association ADSF en mission.
    © ADSF
  • Remise de dons effectuée par l'association ADSF à La Garenne-Colombes.
    © ADSF
  • Remise de dons effectuée par l'association ADSF à La Garenne-Colombes.
    © ADSF

« Nous partons à la recherche des femmes en situation d’exclusion en sillonnant les rues, les bidonvilles, les campements. Nous stationnons devant les gares, les métros, les squares, les hôtels sociaux. Nous les repérons et cherchons d’abord à établir le contact », explique Myriem Maicha.

Une fois le dialogue engagé, l’équipe leur propose de monter dans le camion. Elle leur offre un café, distribue des kits d’hygiène (savons, crèmes, protections périodiques...) et mène un entretien permettant d’établir un premier diagnostic. L’objectif est d’évaluer leur état de santé et les inciter à se rendre dans les structures de l’association ou des centres de santé où elles bénéficieront de tous les soins nécessaires.

Des lieux d’accueil pour un accompagnement global 

Baptisées « Repaires Santé » et pensées sur mesure, les trois lieux d’accueil de l’ADSF (un à Lille et deux à Paris) reçoivent entre 30 et 50 femmes par jour à Paris. Elles prolongent les premiers entretiens en évaluant, de façon complète, les besoins de chacune... Qu’il s’agisse d’examens médicaux (frottis, IST, TROD), de l’ouverture d’un dossier d’accès aux soins, d’un suivi social pour l’obtention d’un hébergement, d’un accompagnement psychologique pour les aider à dépasser les traumatismes vécus. Après ce bilan, les femmes sont dirigées vers les services adaptés, les équipes de l’ADSF servant de point de liaison entre les structures pour accélérer leur prise en charge. Ouverts de 9h30 à 17h du lundi au vendredi, ces lieux accueillent aussi des femmes qui viennent spontanément  seules ou avec leurs enfants  se reposer, prendre une douche, chercher des vêtements, un kit d’hygiène et participer, si elles le souhaitent, à l’un des groupes de parole régulièrement organisés autour de la santé, la sexualité... Le tout sans compter les repas mis à disposition chaque jour par l’Armée du Salut, dans le centre parisien de Barbès.

Et bientôt, un centre à Marseille 

Pour amplifier ses actions, l’ADSF cherche à élargir ses équipes en recrutant des professionnels de santé bénévoles (médecins, infirmières, psychologues …) pour réaliser les premiers gestes médicaux et des évaluations de santé, avant d’accompagner les femmes dans leur prise en charge. Elle fait aussi appel à des volontaires hors contexte médical, leur proposant une formation pour accueillir les femmes, durant les maraudes et dans les lieux Repaires. Une mission que l’association compte bien développer aussi en créant de nouvelles structures, notamment à Marseille…

L’accompagnement de la Fondation Bettencourt Schueller

Le soutien de la Fondation a commencé pendant la période de confinement pendant laquelle l’association a dû faire face à une forte sollicitation dans un contexte particulièrement difficile. Depuis, la Fondation a prolongé son soutien pour aider l’association à structurer son équipe et consolider ses actions.