Contrôler le développement de nos vaisseaux sanguins ? Cela pourrait bien être possible dans l'avenir, grâce aux travaux de recherche d'Anne Eichmann. En croisant neurobiologie et biologie vasculaire, elle dissèque les mécanismes qui amènent le corps humain à former certaines cellules.

Le développement des vaisseaux sanguins, un danger ?

Les vaisseaux sanguins, indispensables à la survie de l’organisme, se forment entièrement pendant le développement embryonnaire. Chez l’adulte, la prolifération des cellules endothéliales, qui bordent l’intérieur des veines et des artères, n'est donc généralement pas une bonne nouvelle. Elle est, la plupart du temps, associée à des pathologies. C'est le cas, par exemple, lorsqu'elles se développent autour d'une tumeur. Comprendre ce qui peut causer ce dysfonctionnement, ou même être capable d'agir dessus, représenterait donc un atout de taille pour développer des traitements efficaces.

La croissance vasculaire à la loupe

Anne Eichmann contribue depuis plusieurs années à la compréhension du développement du système vasculaire. Ses travaux se situent à la frontière entre deux disciplines en pleine expansion : la biologie vasculaire et la neurobiologie. En croisant ces deux champs de recherche, elle met en lumière les similitudes entre les systèmes nerveux et vasculaire pour découvrir de nouvelles cibles thérapeutiques. Elle a découvert plusieurs récepteurs cellulaires qui répondent au facteur de croissance de l’endothélium vasculaire (VEGF). Ces récepteurs sont aujourd’hui la cible de plusieurs agents de chimiothérapie. En bloquant la croissance vasculaire commandée par les tumeurs, les anti-VEGF sont capables de les « affamer », et de lutter ainsi contre leur développement.

Le soutien de la fondation

Le Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant a permis au professeur Eichmann et à son équipe de poursuivre ces pistes prometteuses. Leurs recherches actuelles s’appuient sur la découverte des « tip cells ». Ces cellules, spécialisées dans la croissance, sont situées aux extrémités des vaisseaux sanguins. Les chercheurs s’intéressent particulièrement aux molécules qui contrôlent la croissance capillaire des « tip cells ». Ces travaux laissent présager l’avènement d’une nouvelle compréhension de la formation du système vasculaire et du système nerveux. La maîtrise des mécanismes impliqués permettrait notamment d’empêcher la croissance des vaisseaux sanguins autour des tumeurs ou, au contraire, de l’encourager pour réparer une zone endommagée.

Anne Eichmann en quelques mots

Anne Eichmann pensait devenir vétérinaire. Elle débute ses études dans le domaine, à Berlin, avant de réaliser que la pratique ne lui plaît pas. C’est au cours du voyage autour du monde qui s’ensuit qu’elle découvre la recherche, en tant qu’étudiante dans un laboratoire du Weizmann Institute, en Israël. Depuis, elle ne cesse de contribuer aux avancées de la science. Au cours de son post-doctorat avec Nicole le Douarin, elle isole chez l’embryon de souris l’hémangioblaste, un précurseur commun des cellules endothéliales et hématopoïétiques (du sang). Son travail à l’interface de la biologie vasculaire et de la neurobiologie s’appuie sur des souris mutantes uniques qu’elle développe avec son équipe. Elle s’intéresse aujourd’hui aux interactions entre système nerveux et vasculaire et aux pathologies qui les touchent, comme le diabète.

  • 1994 Doctorat en biologie cellulaire et moléculaire, Université Paris Nord

  • 1994 Post-doctorat dans le laboratoire du Professeur Nicole le Douarin, Institut d’embryologie, Nogent-sur-Marne

  • 1997 Chargée de recherche de 1re classe au CNRS

  • 2002 Directeur de recherche de 2e classe au CNRS, Collège de France, Paris

  • 2005 Directeur de recherche de 2e classe à l’Inserm, Collège de France

  • 2007 Directeur de recherche de 1re classe à l’Inserm, unité Angiogénèse embryonnaire et pathologique, Collège de France

Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant

Le Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant récompense chaque année un chercheur de moins de 45 ans pour l’excellence de ses travaux et sa contribution remarquable à son domaine de recherche scientifique. Ce prix est attribué selon les années à un chercheur établi en France ou travaillant dans un autre pays d'Europe. Vingt-sept lauréats ont été récompensés depuis 1997. A partir de 2023, la dotation de ce prix récompense personnellement le lauréat à hauteur de 100 000 euros.

Tous les lauréats du prix