Abdou Rachid Thiam développe et applique des outils issus de la physique pour étudier le fonctionnement des organites. Parmi ces compartiments cellulaires, il s'intéresse particulièrement aux gouttelettes lipidiques. Son travail multidisciplinaire, à la croisée de la physique et de la biologie, a permis de révéler comment les cellules réorganisent dynamiquement leurs organites en réponse aux variations des niveaux de lipides et d’énergie.

Les gouttelettes lipidiques 

Les cellules eucaryotes possèdent différents compartiments appelés organites, chacun entouré d'une membrane lipidique et remplissant une fonction spécifique. Parmi les organites, on trouve le noyau, les mitochondries ou encore les gouttelettes lipidiques. Ces dernières sont les principaux réservoirs de lipides de la cellule, se formant lors des périodes de stockage d’énergie. Elles consistent en une gouttelette d'huile entourée d'une couche de phospholipides, tout comme dans les émulsions huile-dans-eau. Les gouttelettes lipidiques jouent un rôle majeur dans la dynamique des membranes cellulaires, interagissent avec d’autres organites tels que le réticulum endoplasmique, les mitochondries et les lysosomes, et sont quasi systématiquement impliquées dans les maladies métaboliques et infectieuses, ainsi que dans le cancer.

L’apport de la physique à l’étude des organites

Tout au long de sa carrière, Abdou Rachid Thiam a adopté une approche interdisciplinaire pour étudier les organites, en s’intéressant particulièrement aux gouttelettes lipidiques. Il s’appuie sur des techniques biophysiques comme la micromanipulation ou la formulation en microfluidique pour mesurer avec précision les propriétés physiques et biochimiques de ces gouttelettes. Plus précisément, il essaye de comprendre comment celles-ci se forment ainsi que l’intervention de protéines spécifiques recrutées à leur interface eau-huile pour réguler le métabolisme de la cellule. 

La synergie entre physiciens et biologistes au sein de son équipe a permis de révéler comment les cellules réorganisent leurs organites en réponse aux variations des niveaux de lipides et d’énergie. Ses travaux récents éclaircissent le lien entre les gouttelettes lipidiques et des pathologies telles que les lipodystrophies, les maladies infectieuses, la stéatose hépatique, le diabète de type 2, ainsi que les maladies cardiovasculaires.

Une approche interdisciplinaire pleine d’espoir

Abdou Rachid Thiam dirige actuellement ses recherches vers l’étude de l’homéostasie lipidique, qui repose sur un juste équilibre entre la fabrication, l’absorption, la circulation, le stockage et l’élimination des lipides au sein des cellules. Toute perturbation de ce processus entraîne des troubles tels que la dyslipidémie, la neurodégénérescence et l’athérosclérose. 

Soucieux d’apporter des solutions concrètes, il a fondé Oria Bioscience en 2024, une start-up qui développe des méthodes d’isolation d’organites à des fins thérapeutiques. Par son approche, à la croisée de la physique et de la biologie, le travail d’Abdou Rachid Thiam ouvre des perspectives prometteuses dans divers secteurs de la médecine, avec des outils pertinents pouvant être utilisés dans le domaine de la cosmétique.

Abdou Rachid Thiam en quelques mots 

Abdou Rachid Thiam est titulaire d'un diplôme d'ingénieur en physique de l'ESPCI Paris et de l'UPMC, et a effectué ses recherches postdoctorales à l'université de Yale. Depuis 2014, il dirige une équipe de recherche multidisciplinaire à l'École Normale Supérieure (ENS) qui explore la biophysique et la biologie cellulaire des gouttelettes lipidiques et leur communication avec les autres organites. Il est engagé activement dans la promotion des sciences, en particulier dans les communautés défavorisées en France et au Sénégal. 

L’originalité de son approche a été reconnue par sa nomination en tant que membre de l’EMBO en 2025, et par l’obtention de nombreux prix, dont la médaille de bronze du CNRS en 2020, le prix Claude Paoletti en 2018, et le prix Thomas E. Thompson de la Biophysical Society en 2022.

© Romain Redler / Art in Research pour la Fondation Bettencourt Schueller
  • 2020 Médaille de bronze du CNRS

  • 2018 Prix Claude Paoletti

  • 2022 Prix Thomas E. Thompson de la Biophysical Society

  • 2025 Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant

Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant

Le Prix Liliane Bettencourt pour les sciences du vivant récompense chaque année un chercheur de moins de 45 ans pour l’excellence de ses travaux et sa contribution remarquable à son domaine de recherche scientifique. Ce prix est attribué selon les années à un chercheur établi en France ou travaillant dans un autre pays d'Europe. Vingt-sept lauréats ont été récompensés depuis 1997. A partir de 2023, la dotation de ce prix récompense personnellement le lauréat à hauteur de 100 000 euros.

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