Fondée en 2015, cette association multiplie les actions en faveur des personnes sans abri en répondant à leurs besoins les plus urgents mais aussi, et surtout, en leur permettant de retisser du lien social. Une façon originale et très efficace de mobiliser l’engagement citoyen pour favoriser la réinsertion, alors que le nombre de personnes sans domicile ne cesse de croître en France.

Aujourd’hui, environ 350 000 personnes vivent sans domicile fixe en France*, et 65% d’entre elles n’ont pas eu de contact avec leur famille ou avec des amis depuis plus d’un an. C’est pour lutter contre la précarité et l’isolement que Louis-Xavier Leca a fondé, en 2015, l’association La Cloche avec un objectif : offrir un soutien global aux plus fragiles. « Nous sommes partis de deux observations », explique Goli Moussavi, directrice régionale de l’association. 

« D’une part, nous voyions de plus en plus de personnes sans abri vivre totalement isolées dans les rues. D’autre part, des habitants démunis, désireux de les aider mais sans savoir comment. Fort de ces constats, nous avons imaginé un projet qui permette aux citoyens d’agir directement contre l’exclusion en tissant des liens avec les plus précaires, à l’échelle de leur ville de leur quartier. S’il existe de nombreuses structures qui répondent aux besoins de première nécessité (nourriture, logement, soins), peu d’initiatives travaillent à retisser un lien social. Un élément sous-estimé, et pourtant essentiel à la réinsertion ».

  • Chorale de l'association La Cloche lors du Festival C'est pas du Luxe, Avignon, septembre 2022.
    © Baptiste de Ville d'Avray / Hans Lucas pour la Fondation Bettencourt Schueller
  • Choriste de l'association La Cloche, Avignon, 2022.
    © Baptiste de Ville d'Avray/ Hans Lucas pour la Fondation Bettencourt Schueller
  • Choristes de l'association La Cloche, Avignon, 2022.
    © Baptiste de Ville d'Avray/ Hans Lucas pour la Fondation Bettencourt Schueller
  • Choristes de l'association La Cloche participant au Festival C'est pas du Luxe, Avignon, septembre 2022.
    © Baptiste de Ville d'Avray / Hans Lucas pour la Fondation Bettencourt Schueller
  • Marianne Suner, cheffe de chœur de la chorale de l'association La Cloche, lors du Festival C'est pas du Luxe, Avignon, septembre 2022.
    © Baptiste de Ville d'Avray / Hans Lucas pour la Fondation Bettencourt Schueller
  • Choristes de l'association La Cloche participant au Festival C'est pas du Luxe, Avignon, septembre 2022.
    © Baptiste de Ville d'Avray / Hans Lucas pour la Fondation Bettencourt Schueller

Le Carillon, un réseau de commerçants solidaires et engagés 

L’association déploie aujourd’hui deux programmes. Avec Le Carillon, elle a tissé un réseau de commerçants solidaires (boulangeries, épiceries, restaurants, coiffeurs…) qui s’engagent au quotidien, comme le raconte Clément, propriétaire du bar Dans la Foulée, au cœur du quartier de Ménilmontant à Paris. « J’ai ouvert ce bar il y a quelques années et j’ai tout de suite eu envie de lui donner une vocation sociale. Avec Le Carillon, l’idée est d’offrir aux personnes sans abri l’accès à des services très simples : boire un verre d’eau, utiliser les toilettes, réchauffer un plat, recharger son téléphone, déposer une valise avec ses affaires durant la journée. Et bien sûr, proposer un café ou un sandwich ». 

Dans le même temps, ces commerçants ont pour mission d’inciter leurs clients à participer à cet élan solidaire en prépayant des produits (boissons, repas…). Une aide matérielle qui constitue aussi un point d’entrée pour tisser le lien social. Reconnaissables au pictogramme collé sur leur devanture, ces commerces sont bien connus des personnes sans abri, assurées de trouver là un véritable accueil pour faire une pause, et bavarder. 

« Au fil du temps, il se crée de vrais liens d’amitié avec les clients. Ce mélange entre les bénéficiaires du Carillon et les habitants du quartier est très enrichissant, il participe au décloisonnement de la société », poursuit Clément.

Certains commerçants vont même plus loin en organisant, une à deux fois par an, des soirées qui réunissent locaux et personnes sans abri. Parmi les dernières en date, celle organisée en octobre 2023 au restaurant Le Hasard ludique, dans le 17e arrondissement de Paris. Après avoir passé un « appel à Talents », le propriétaire a réuni quelque 100 personnes venues applaudir bénévoles et personnes de la rue montés sur scène pour des lectures de poèmes, des duos de danses et des concerts à deux ou trois musiciens.

La Clochette, un programme pour faire, et vivre, ensemble 

Parallèlement au Carillon, l’association a développé le programme La Clochette qui réunit des collectifs d’habitants désireux d’impliquer les plus fragiles dans des projets destinés à « faire ensemble »  jardiner, bricoler ou cuisiner un repas qui sera ensuite partagé. À Lyon, Marseille et Paris, La Cloche a initié des chorales de quartier réunissant, chaque semaine, chanteurs amateurs et personnes sans abri sous la direction d’un chef de chœur bénévole. Elle a lancé une web radio, Radio Bitume, et une gazette trimestrielle qui porte la voix des plus démunis. Enfin, elle a imaginé des rendez-vous aussi ludiques qu’iconoclastes, les « soupes impopulaires ». 

« Ces soupes sont préparées par des bénévoles et des personnes sans abri à l’aide de collecte de produits invendus. Elles sont ensuite proposées aux passants, ce qui inverse les rôles. Avec cette démarche, nous rappelons aux citoyens qu’une personne vivant dans la rue a aussi des compétences et l’envie de participer à la vie de son quartier. Rien de mieux pour tordre le cou aux clichés ! »

Une approche globale pour susciter l’engagement citoyen, et favoriser la réinsertion 

Après neuf années sur le terrain, La Cloche est désormais présente dans dix régions de France où elle fédère un réseau de 1 300 commerçants solidaires, propose chaque année 10 000 services et compte plus de 50 000 passages dans ces commerces labellisés. Grâce au réseau du Carillon, l’association a récemment lancé le programme « Mon Taf solidaire ». « Ce projet d’inclusion professionnelle est conçu comme un premier pas vers la réinsertion, un retour progressif et direct à l’emploi chez des commerçants solidaires, explique Goli Massavi. Des personnes en situation de précarité, accompagnées par un organisme d’insertion partenaire (l’ADPEI**) sont embauchées pour quelques heures dans ces commerces. Expérimenté à Marseille, il sera ensuite décliné dans nos autres antennes ».

L’association travaille par ailleurs à des actions plus globales et systémiques. Elle organise des formations pour ses équipes de bénévoles et de commerçants mais aussi au sein des entreprises qui le souhaitent, notamment les banques ou les sociétés de grande distribution dont les salariés rencontrent quotidiennement des personnes sans abri devant leur lieu de travail. Elle renforce ses partenariats avec d’autres associations afin d’essaimer l’esprit La Cloche et de démultiplier les actions. « Autant de façons d’amplifier nos actions en restant fidèles à notre mission historique », poursuit Goli Moussavi. « Favoriser l’engagement citoyen, créer du lien, et participer à la transformation du regard de la société sur les plus démunis ».

La Cloche chante à C'est pas du luxe ! | Association La Cloche 2022

*Chiffres 2023, Fondation Abbé Pierre. 
** ADPEI, Association départementale pour l’emploi intermédiaire.

Découvrir le projet

La Cloche

Changer le regard sur le monde de la rue en favorisant le lien social de proximité : telle est l’ambition de La Cloche. Depuis 2014, cette association engage les citoyens à agir contre l’exclusion en tissant des liens avec les...